Le tiers-lieux culturel de La Maison Forte

Étude de terrain en Septembre 2022

12/1/20223 min read

Nous nous sommes rendu.e.s à la Maison Forte, dans le cadre de leur festival de cinéma documentaire nommé Champs Magnétique, qui a lieu une fois par an. La Maison Forte, située dans une petite commune entre Toulouse et Agen du nom de Monbalen, se définit comme un “tiers-lieu culturel”, un “espace d’expérimentations qui invente un écosystème de projets et d'initiatives à haute valeur sociale et culturelle” ou encore une “fabrique coopérative des transitions”. La vision des deux créateurs, Michel et Manu, issus du secteur culturel, est d’offrir un espace ouvert à la création et à l’expérimentation de divers artistes, artisans, scientifiques et penseurs du monde de demain. On retrouve sur leur site : “Chaque année, au mois de mars, un appel à résidence permet à une dizaine de chercheurs, artistes, designers… d’expérimenter une idée liée à la transition au cours d’une résidence.” La Maison Forte regroupe un large potager poïétique (politique et poétique), une source d’eau, des ateliers d'artistes, une scène extérieure, une salle de projection et bien d'autres terrains laissant libre cours à l’imagination. Dans une logique d'émulsion, elle donne lieu conjointement à des concerts, des activités, et des animations afin de profiter à la population locale, d’attirer des personnes des plus grosses villes ainsi que d’ouvrir la voie à d’inhabituels imaginaires du monde rural. Certaines personnes habitent sur place, ou sont simplement de passage, et une vie de collectif en ressort ; repas partagés, échanges, activités spontanées. Les recherches collectives et résidences artistiques portent entre autres sur l’innovation sociale, les moyens de coopérer sur le territoire, les low tech et une approche sensible de la nature.

La Maison Forte dépend d’aides de l’État et de la Région : depuis 2021, ils sont reconnus "Fabrique de Territoire" par l’Agence Nationale de la Cohésion des Territoires et lauréats, dans le cadre du plan France Relance, d'une aide de l'Ademe (Agence de la transition écologique) pour le Slow Tourisme. Les créateurs défendent ce droit de toucher des subventions car ils répondent selon eux à un “service public”. Ils se définissent eux-même comme les petits “chats noirs” du réseau des Tiers-Lieux, qui restent pour la plupart très réformistes. L’objectif est avant tout de créer du lien, d’échanger des connaissances et de permettre à des réseaux de se développer, et non de vivre dans un mode de vie écologique et résilient.

Nous sommes allés à une de leurs rencontres regroupant plus de cent personnes : le festival Champs Magnétique, leur grand rendez-vous ciné, débat, politique annuel , qui avait pour thème: “Action(s) locale(s). Territoire Politique”. Aiguillées par des interventions de chercheur.euses, d’acteur.rices institutionnels, d’entrepreneur.euses, de botanistes, de militant.es et autres, nous avons tenté de redéfinir ensemble le terme de territoire lors de débats après des projections de documentaires ou des présentations de projets précis. Chaque personne, avec des savoirs “experts” ou non, habitant.es et non habitant.es, prenait la parole pour donner son avis, faire connaître son vécu, son expertise, son approche personnelle, de façon totalement horizontale. Des balades ethnobotaniques et auditives où tous nos sens étaient stimulés ont aussi été organisées, permettant de découvrir l’histoire et la biodiversité du lieu autour de savoirs sensibles. Nous retenons de ce lieu un espace ouvert à des questionnements sur les imaginaires, les compétences artisanales oubliées et le déploiement d’un contre pouvoir local par des coopérations possibles. Les résidents s’interrogent d’ailleurs sur la création de liens entre êtres humains partageant un même territoire sans en avoir la même vision, dans leur projet “Mattang”, une cartographie relationnelle sémantique qui vise à “activer les ressources citoyennes des territoires”.